Je suis une petite fille insouciante en voyage en Asie avec ses parents. Je vois un groupe d’enfants jouant dans la rue, ils ont mon âge et quelle est ma tristesse de voir qu’ils n’ont plus de doigts. Je suis encore plus triste lorsque mon père m’explique qu’ils ont une maladie qui s’appelle la lèpre, une maladie contre laquelle il existe un médicament mais que malheureusement le médicament est trop cher pour qu’ils puissent se le procurer. A quoi sert donc ce médicament si ceux qui en ont besoin ne peuvent pas en bénéficier ?
Mon père m’a toujours ouvert les yeux sur le fait que nous ne naissons pas tous avec les mêmes chances. Nous avons une jolie maison, de bons repas, une éducation nous permettant d’avoir des opportunités. Je pouvais jouer alors que d’autres enfants de mon âge devaient travailler, n’avaient pas de toit et se nourrissaient des ordures des gens plus fortunés. Il m’a appris l’empathie, et me disait que ceux qui ont plus devraient partager avec ceux qui ont moins.
A l’âge de 16 ans j’ai travaillé comme bénévole dans une école qui a accueilli 30 enfants de la région de Tchernobyl pour l’été. Je suis allée les chercher à l’aéroport, nous avons eu l’autorisation de passer de l’autre côté de la douane pour les accueillir. Puis nous avons attendu devant les tapis roulants. Lorsqu’une une des accompagnatrices m’a demandé ce que nous attendions. « Les bagages bien sûr ! », la dame, l’air surpris, m’a informée qu’il n’y avait pas de bagage. Les enfants sont arrivés à l’aéroport avec uniquement les vêtements qu’ils portaient sur eux, sans habits de rechange, sans brosse à dents, sans pyjama, sans doudou. Après quelques jours, nous avons aussi réalisé que ces enfants, qui étaient pour la plupart mal nourris, ne pouvaient pas faire de marches en montagne ou d’activités sportives comme les autres enfants qui étaient venus en vacances car ils étaient beaucoup plus fragiles. Suite à cette expérience, le directeur de l’école, qui avait toujours accueilli des enfants privilégiés, a décidé de créer une fondation pour les enfants démunis.
Ousmane: Plus tard alors que j’étais dans le monde du travail, deux de mes collègues ont ouvert une école au Burkina Faso et un grand nombre de collaborateurs ont parrainé les enfants de la fondation. J’en ai fait de même en parrainant un enfant du même âge que ma fille Noa. Au fil des correspondances, Noa a découvert que la vie du petit Ousmane était bien différente de la nôtre :
Noa : Explique un jour où tu étais fâché
Ousmane : Je ne suis fâché que si je n’ai pas eu à manger
Noa : Que fais-tu quand tu ne vas pas à l’école ?
Ousmane : Je lave mes habits, j’aide mes parents à travailler
Noa : Comment as-tu aidé ta famille cette semaine ?
Ousmane : J’ai aidé à construire des maisons
Lors d’une conversation autour d’une table de philanthropes, l’un d’eux m’a raconté que ses enfants ont trois tirelires et qu’ils divisent leur argent de poche à parts égales entre les trois tirelires : une pour économiser, une pour dépenser et une pour donner. Si mes souvenirs sont justes, à la fin de chaque année il demande à chaque enfant à quelle cause il aimerait donner cet argent et il double cette contribution.
Cela paraît si simple et pourtant il faut y penser !
J’ai donc décidé d’en faire de même et de donner trois tirelires à ma fille, pour l’inspirer à faire une différence autour d’elle mais aussi pour avoir un projet qui nous réunisse sur le long terme.
La générosité est quelque chose qui se partage, elle peut se transmettre entre les générations et à travers différents cercles (par la famille, les amis, l’école, le travail…). La philanthropie est un magnifique outil pour réunir les familles, les amis, les collègues autour d’un but commun. J’ai toujours été admirative de voir à quel point une personne, une idée peut générer quelque chose d’encore plus grand.
En cette période de fêtes mon souhait serait que chacun d’entre nous se demande comment partager afin de faire un effet boule de neige et de multiplier la générosité.
Crédit photographique: Association Kaicedra