Voilà près de sept ans que j’ai plongé dans le monde fascinant de la philanthropie. Tout au long de mon parcours, j’ai rencontré des centaines d’êtres humains passionnés, tous animés par la volonté de donner afin d’avoir un impact positif sur la société.
Si le secteur a indéniablement évolué ces dernière années, l’élan des philanthropes et représentantes et représentants de fondations avec lesquels je suis amenée à travailler n’a pas diminué, bien au contraire. Entre 2015 et 2020, ce sont près de deux mille nouvelles fondations d’utilité publique qui ont été constituées.
Donner est un geste simple, universel et intemporel. Les motivations desquelles il émane sont pourtant variées et souvent difficiles à identifier, puisqu’il se veut, en premier lieu, désintéressé.
L’acte du don a indéniablement précédé sa conceptualisation et sa structuration. La plus vieille fondation suisse encore en activité, l’Hôpital de l’Ile à Berne, a d’ailleurs été créée en 1354, soit plus de quatre cents ans avant l’entrée du mot “philanthropie” dans le dictionnaire de l’Académie française, en 1762.
Aux origines, on associe la philanthropie avec la charité, exercée par quelques privilégiés en faveur des plus défavorisés pour pallier les inégalités. On observe aujourd’hui une multitude d’acteurs qui tendent à donner par proximité idéologique à des causes qui leur sont chères, pour tendre vers un idéal de société. En outre, les notions de cohérence et de responsabilité sont davantage intégrées et la philanthropie se veut toujours plus engagée.
Les motivations traditionnelles qui consistent « simplement » à rendre à la société ce qu’elle nous a donné n’ont certes pas disparu. Mais ce que j’observe au quotidien, c’est que la récente crise sanitaire et les menaces qui pèsent sur un monde toujours plus globalisé ont accéléré la prise de conscience de la responsabilité sociétale des fondations. Ce principe, qui a d’ailleurs été intégré dans la dernière édition du Swiss Foundation Code, implique de tenir compte de l’évolution de la société et de ses nouveaux enjeux, afin de mener des activités de soutien en phase avec leur temps.
Les donatrices et donateurs ne souhaitent plus seulement combler les failles du système, mais sont toujours davantage à vouloir anticiper les changements sociétaux, afin d’agir en amont des problématiques. Les initiatives collaboratives, qui regroupent philanthropes, fondations, entrepreneurs sociaux et acteurs de la société civile tendent à se développer ces dernières années, avec notamment pour motivation la perspective d’un effet de levier.
En parallèle, le don n’est plus seulement l’apanage d’institutions philanthropiques telles que les fondations. Les jeunes générations se posent de nouvelles questions sur leur rôle, la façon de gérer leurs ressources et d’utiliser leur fortune. Le don n’est souvent plus seulement un acte sporadique, mais il est intégré au mode de vie, avec pour motivation d’avoir un impact toujours plus positif au quotidien.
Ces nouvelles tendances témoignent de l’évolution de nos sociétés. Elles sont le reflet d’un monde en mutation, et de systèmes toujours plus complexes. Alors, les fondations sont-elles dépassées ? Je ne pense pas. En tant qu’actrices de la société civile, elles adaptent leurs modes d’action et professionnalisent leurs activités, afin de réaliser leur but de la façon la plus efficace et impactante possible. Les nouvelles formes de dons des jeunes philanthropes et des entrepreneurs sociaux viennent compléter leur action, vers des buts qui s’orientent dans la même direction.
Au même titre que la biodiversité est un indicateur de bonne santé d’un environnement, je pense que la variété des motivations et la complémentarité des approches contribuent à la richesse du secteur philanthropique.